Un banal terrain en friche
s'est métamorphosé en luxuriant jardin de 600 m², aux plus de deux
cent espèces végétales. Il aura fallu une quinzaine d'années de
travail et une rencontre entre un prêtre et un jeune retraité pour
en arriver à ce résultat. Récit de la renaissance de ce jardin de
curé, situé à l'église Saint-Pierre de Cholet (Maine-et-Loire).
En 2004, Paul Vincent, alors
curé de l'église Saint-Pierre de Cholet, demande à Pierre Boureau,
éducateur sportif à la retraite, de venir sur ce terrain municipal
à l'abandon pour « le nettoyer de fond en comble. »
Pierre Boureau accepte. De façon totalement bénévole, il arrache
les plantes inopportunes, loue une charrette, se met en contact avec
un groupe agricole d'exploitation en commun (GAEC) spécialiste des
questions horticoles. « Cette expérience m'a permis de
renouer avec mes origines paysannes, de me remémorer la culture des
plantes que m'a transmis ma mère » concède-t-il. Transformer
cet endroit selon les critères d'un jardin de curé devient alors
une évidence pour lui.
Un jardin de curé simple,
utilitaire et fonctionnel
Le terrain est segmenté en
quatre parcelles, quatre comme les Évangiles. Ces parcelles sont
disposées autour de haies de buis, élément de base pour tout
jardin de curé digne de ce nom, car il bénéficie de propriétés
protectrices et symbolyse les cycles de la vie. Le jardin est
également conçu selon sept principes. On y trouve des plantes
potagères, médicinales, aromatiques, symboliques, d'ornement, de la
vigne et de l'eau. Sauge, thym, jasmin d'hiver, potiron, cerisiers,
iris… Ce sont plus de 200 espèces végétales qui cohabitent dans
cet espace de biodiversité.
« Dans ce lieu situé en
plein cœur de ville, le calme et le silence sont très surprenants,
savoure Pierre Boureau. Je vis de longs moments d’observation, de
réflexion. L'endroit invite à la méditation. Pour moi, entretenir
ce jardin est un retour à la terre, un moment de respect, de
Création. » Un espace qu’il partage avec d’autres, comme
René Gouffier, ancien jardinier de la ville de Cholet, qui a rejoint
le projet en 2014 et apporte toutes ses compétences. Mais surtout
avec la paroisse.
Partages
Les
semences sont récupérées au hasard de balades dans la nature et
d'échanges avec des paroissiens ou des proches. Toutes les semaines,
les personnes chargées de la décoration de l'église viennent
s'approvisionner en fleurs, en fonction des temps liturgiques, de la
symbolique des couleurs des fleurs, et au gré des saisons.
Par
exemple le
lys blanc coïncidera à l’Ascension, la rose à l’Assomption, le
chrysanthème violet à la Toussaint. Quant aux fruits et légumes,
ils sont récoltés par les prêtres eux-mêmes, pour leurs repas.
Des visites y sont organisées par l'office de tourisme de Cholet
faisant découvrir anecdotes, légendes et vertus à propos des
espèces végétales. Toujours dans cet esprit de partage, Pierre
Boureau a rédigé un fascicule, « C'est quoi un jardin de
curé ? ». De quoi sensibiliser touristes, paroissiens,
voisins.
Eglise
verte
La
paroisse de Saint-Pierre de Cholet est engagée auprès du
label Église verte. Officiellement lancé le 16 septembre 2017, ce
label existe grâce à l'implication de treize structures -
religieuses, solidaires et environnementales.
Son ambition est de valoriser les communautés chrétiennes engagées
dans une oeuvre de conversion écologique, préparant avec foi
l'émergence de nouveaux modes de vie. Grâce à un éco-diagnostique
consultalbe en ligne, les paroisses évaluent leur démarche
écologique. Et en fonction de cette évaluation, elles sont
distinguées par l'un des cinq niveaux de labels : Sénevé, Lys des
Champs, Cèpe de Vigne, Figuier, Cèdre du Liban. À ce jour, sur un
total de 168 communautés chrétiennes investies dans la démarche,
aucune ne s'est encore vue attribuée le niveau le plus élevé.
Bien
plus que du jardinage
Pendant
sept ans, jusqu'à fin août 2018, le père Jean-Marie Gautreau –
actuellement délégué
épiscopal Foi et Cultures du Diocèse Angers – a été
curé de Saint-Pierre et de Notre-Dame de Cholet. Il aime ce jardin,
caché derrière de hauts murs, donnant une vue originale sur une
partie spéciale de l'église. Il voit dans l'existence de ce jardin
une mise en action concrète de l'encyclique Laudato Si’ : « Le
pape François nous demande une conversion écologique intégrale. À
chacun sa petite goutte, pour permettre l'avènement d'un autre
monde, avec plus de simplicité, plus de vie. Et donc pour une
paroisse, il s'agit de valoriser ce qu’elle a (pour nous, il s'agit
d'un jardin de curé… ), d'accepter de se mettre en route. »
Thomas
Masson
Les Cahiers Prions en Eglise (Cahiers 262 – Pentecôte
2019)