La politique de la maison :

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dimanche 8 mars 2015

Les barrages de Sivens ont tous cédé ; pour le moment :



La situation était mal barrée. Tout cela, à cause de trop de barrages : barrage hydraulique, barrage policier, barrage de militants, barrage d’agriculteurs,  etc... Depuis le 6 mars, tout le monde – ou presque - s’est barré de la zone à défendre de Sivens. Le calme est de retour. Pour combien de temps ?



 


Illustration de l'occupation de la ZAD de Sivens - crédit Guy Masavi - Flick'r


Ils sont regroupés entre eux. Agrippés les uns aux autres. Ils sont assis par terre. Regroupés les uns contre les autres. Ils résistent. Une toute dernière fois. Pour l’honneur. Pour la nature. Pour une zone humide. Pour Rémi.  Ils chantent «  Rémi, Rémi, on t’oublie pas ! ». Ils lancent quelques insultes aux étranges et nombreux hommes en bleu marine : « assassins », « vous faites un métier de merde », … Les hommes en uniforme ne répondent pas. Ils détachent ces derniers maillons humains. L’un après l’autre, chaque chaînon cède. C’est la fin d’une longue lutte. Trois cents contre trente, le rapport de force est disproportionné.  Nous sommes le 6 mars 2015. Les derniers zadistes, opposés au projet de barrage de Sivens, viennent d’être expulsés par les forces de l’ordre. Mettant fin à seize mois d’occupation de la zone.

43 voix contre 3 :

Cette opération d’expulsion a été rendue possible par le Conseil Général du Tarn. Le vendredi 6 mars, à 11h15. La majorité des élus s'est sont  prononcée - 43 voix contre 3 -  pour « l’expulsion sans délais des zadistes ».  La suite est connue : vers quatorze heures,  300 gendarmes suréquipés, accompagnés de bulldozers, de quinze fourgons, d’un drone et de deux hélicoptères encerclent les trente zadistes et leurs animaux (boucs, poules, cochons, brebis, chiens, etc…).  En deux heures le camp est vidé et démantelé, sans heurt majeur.

Soulagés :

Suite à cette intervention, Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur « félicite l’ensemble des forces de l’ordre, qui ont mené cette délicate opération. Il conclut, avec assurance, « aujourd’hui, à Sivens, le droit et la démocratie ont prévalu sur la violence. Et c’est une victoire de la République ».  L’État peut dormir sur ses deux oreilles. Les 200 agriculteurs pro-barrage sont rentrés chez eux. Vingt et un zadistes ont été interpellés. L’intervention de l’État permet ainsi de mettre fin aux tensions qui durent depuis des mois et qui ont vu mourir Rémi Fraisse.

Joeffrey, le fondateur  de l’association les Riverains de Sivens, raconte « on va enfin faire redescendre la pression, retrouver un peu de tranquillité et une vie normale. Je suis soulagé que ce soit enfin fini ».  David Escande, l’exploitant agricole du terrain occupé par les zadites, va dans ce sens : «  on attendait cette évacuation depuis des mois car on avait l’impression de vivre dans une zone de non-droit  ». 

Le zone humide de Sivens en septembre 2013 - crédit Jean-Marc Aspe - Flick'r

Pour maintenir la sérénité, près de 150 gendarmes resteront tout de même sur le site. Cela jusqu’à fin mars.  

Réduit, mais barrage quand même :

Les camps sur le front ont été levés.  Mais le nerf de la guerre reste encore sensible. Le fameux projet de barrage de Sivens, revu à la baisse, reste d’actualité. Le projet de barrage  initial, prévoyant une retenue d’eau  - surdimensionnée - de 1,5 million de mètres cubes sur une zone humide, est abandonné. Mais une version allégée d’au moins 750 000 mètres cubes est retenue par le Conseil Général du Tarn.

Mais cela ne devrait pas trop être un handicap pour la collectivité territoriale. Ségolène Royal, dans une lettre datée du 27 février 2015, s’est engagée à ce que l’État lui indemnise « les opérations déjà mises en œuvre au titre de projet initial et qui ne pourront pas être redéployées pour réaliser le nouveau projet ». Cette incitation financière, est tout de même d’un montant compris entre 2 et 3 millions d’euros. Bien entendu, cette charge sera à supporter par les contribuables français.

Critiques :

La zone humide de Sivens est dégagée. Mais dans les coulisses, il reste des zones d’ombres. La première concerne la CACG (Compagnie générale des coteaux de Gascogne). Cette société est celle qui a réalisé en 2001 les études concluant à la nécessité de construire le barrage initial. C’est elle qui est maître d’ouvrage et elle qui devrait – à priori – devenir gestionnaire par la suite. Cette situation porte un nom : conflits d’intérêts. Lancer un véritable appel à projet serait pour le coup démocratique et républicain.

L’autre reproche concerne les principaux destinataires du barrage. L’eau stockée servirait en effet à 30 agriculteurs, pratiquant la culture intensive. Surtout, ce projet leur permettrait de cultiver du maïs semence. Un produit, considéré à forte valeur ajoutée, mais qui nécessite beaucoup d’eau lors de sa phase de croissance. 

Alternatives :

Beaucoup de voix, d’experts, s’élèvent pour proposer d’autres solutions à ce barrage coûteux et impactant. Les pouvoirs publics, les agriculteurs peuvent développer les bassines - retenues d’eau de substitution -  financées par la PAC (politique d’agriculture commune). Ils peuvent également utiliser les eaux traitées de la station d’épuration de la ville voisine : Gaillac. Enfin, 30 % de l’eau du barrage seraient consacrés à dépolluer les eaux usées. Réduire – à la source – les déversements chimiques, agricoles, etc…constitue également une solution de substitution du projet du barrage.

L'Hoplie bleu, vivant dans la forêt de Sivens - crédit Sandrine Rouja - Flick'r


La seule chose qui est sûre, c’est que les 94 espèces animales protégées et 353 espèces de plantes vasculaires de cette zone humide vont avoir un temps de répit. Près de deux années. Le temps que les études de faisabilités et que les concertations aboutissent à un compromis.


Par Thomas MASSON
 @Alter_Egaux


( sources : L'Humanité, Le Monde, L'Obs, Public Sénat, Ministère de l'Intérieur, La Dépêche, Reporterre )

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