La politique de la maison :

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mardi 22 juillet 2014

"Chez Albert" – Une friche éphémère, mais qui « restera dans le cœur des gens »

Deux associations, Yes We Camp et La Semeuse, ont mutualisé leurs compétences. Pendant dix semaines elles ont revalorisé une friche d’Aubervilliers, ville de Seine Saint Denis. « Chez Albert » a été et restera un lieu d’expérimentation sociale, urbaine, botanique, etc… Pour que les voisins deviennent acteurs de leur vie de quartier. 

 

-« 16- A ».
- « Mais non  ! Il y a 16 – 15 ! »
- « Ah oui. Je me suis trompé. Ca arrive ! »

Après cette altercation bon-enfant, les deux joueurs de ping-pong reprennent leur partie.
Montée sur des parpaings, constituée de matériaux récupérés, cette table de ping-pong est le symbole de cette friche d’Aubervilliers. Elle montre qu’en innovant, qu’en bricolant, qu’en assemblant, on peut redonner vie à un quartier. 

Sous les déchets, la verdure :

Tarek Adda, 21 ans, étudiant en architecture d’intérieur le confirme : « avant, tout n’était que poussière. En déblayant tous les déchets, on a vu du vert. On a vu de l’herbe qui poussait. Puis on a du faire de la médiation de voisinage. Car certains voisins se plaignaient des allées et venues, de la musique, des cris. C’est marrant de voir comment tout ça a évolué ».

A première vue le 52 rue Lecuyer, près du métro « Quatre chemins » d’Aubervilliers, est  un immense terrain vague.
Sous nos pieds, une terre malmenée. Par du gravier, des cailloux, des morceaux de bitume,  et des flaques d’eau.  Autour de nous, les murs sont tagués. Des mauvaises herbes qui piquent, sont hautes comme des Hommes. A deux extrémités de la friche, un homme seul écluse une bière tandis qu’une bande de jeunes roulent un pétard. On se sent un peu mal à l’aise. Mais finalement, ce lieu prend vie.
Celui qui buvait et ceux qui s’apprêtaient à fumer partent. Autour de l’eau, élément essentiel pour la vie, tout s’anime. Deux chiens s’amusent dans les flaques. Faisant un joyeux vacarme. Une fillette lance des cailloux dans une des flaques d’eau. Sur un côté, un potager en forme de « trou de serrure »,  accueil des courgettes, des tomates, des piments et une coccinelle. Des enfants, pour se rafraichir de la chaleur, courent sous une structure de tuyau d’arrosage. 

« Chez Albert », est aussi un lieu où des constructions sommaires abritent l’activité de l’Homme.
Sur des bancs et transats, sous une ombrière, faits d’assemblages de palettes, des gens échangent et se reposent. Un barbecue en parpaings fume et fait cuire des grillades. Sous une cabane évolutive, faite de poutres de métal et de planches de bois, une dame lit les aventures d’un certain Ismaël, artiste qui fait des cabrioles dans les rues. A l’autre bout, une association locale étend sur un banc ses outils, pour réparer les vélos. Sur la gauche, une mini serre semble être rudimentaire. Mais en s’approchant, on s’aperçoit qu’elle est connectée à l’aide d’une webcam et de panneaux solaires. Eparpillés sur des tables, sont disposés des confitures de poivrons, des tartelettes aux fraises, du sirop de mauve, du thé à la menthe, des spécialités algériennes et vénézuéliennes. Des jeunes s’affrontent pendant un tournoi de pétanque.

Un homme et deux femmes traversent la friche,  couronnes de fleurs juchées sur leurs têtes.  Le ciel est traversé par du pollen, des bourdons et des avions.



Une association d’associations : 

Cette friche est la propriété d’EPF (Etablissement Public Foncier). Cela faisait plusieurs années que ce terrain était laissé à l’abandon.
Pour le faire revivre, il aura fallu de la pugnacité. Celle d’Ingrid Amaro, coordinatrice de l’association « La semeuse –Plateforme pour la biodiversité urbaine ». Elle aura du négocier entre octobre 2013 et fin mai 2014. Appuyée par la mairie d’Aubervilliers, Ingrid Amara a eu gain de cause. Jusqu’à fin 2014, cette friche d’Aubervilliers pourra être occupée, de manière gratuite.
Ingrid Amaro est une paysagiste et designer urbaine d’origine espagnole. Pour elle, « cette friche abolit les frontières, mélange les gens et les compétences. Nous intervenons pour que les gens soient acteurs de leur environnement et de leur espace. Avant, il ne s’y passait rien. Cette initiative va s’imprimer dans le cœur des gens ».  

Pour diversifier les compétences, elle payé 10 000€ l’association « Yes We Camp ». Qui a fait ses preuves en 2013, en créant à Marseille une mini-ville éphémère de plusieurs centaines d’habitants. Lisa Georges, botaniste bénévole de  Yes We Camp explique que son association a pour rôle de « mettre les gens en situation de faire les choses, de se rencontrer. Nous sommes juste là pour impulser des dynamiques ». Elle constate qu’ « à Aubervilliers, il y a des gens de tous les pays » et espère que « pendant quelques semaines on a permis à des gens de se rencontrer ». 

La friche transformée en culture(s) : 


Au 52, rue Lécuyer de la ville d’Aubervilliers, métro « quatre chemins », il ne faut plus parler d’une friche.
Le mot culture, ou cultures, est plus approprié à cet endroit.  Car maintenant les voisins, d’origines différentes, s’y rencontrent. Car il se cultive des courgettes, piments, tomates, choux. Car des manifestations culturelles de tout type s’y tiennent. Aux parties de ping-pong, s’ajoutent des tournois de pétanque, ateliers réparation de vélos, lectures, ventes de spécialités culinaires, etc… 

 

« Quand on ouvre une nouvelle ligne de bus, personne ne la prend. Il faut du temps » - Lisa George de Yes We Camp : 

Le bilan se fera sur le long terme, dans plusieurs mois. D’autant plus que le 13 juillet 2014, l’association YES WE CAMP a quitté les lieux. C’est maintenant La Semeuse prend la relève de manière autonome. Jusqu’à la fin de l’année, cette association sera entourée par d’autres associations locales, un architecte et certains habitants. Des pièces de théâtre, ateliers d’écriture, cours de salsa et le développement des jardins sont au programme.
En tout cas, Ingrid Amaro, coordinatrice de la Semeuse et confiante, car elle affirme qu’ « on a tous un pouvoir fou ».

En partant de cette friche, vous entendrez une dernière fois son pouls. Vous entendrez la balle de ping-pong rebondissant contre la planche et tapant contre les raquettes. Tant qu’il y aura cette table, la vie sur cette friche sera rythmée…


PS: merci au journaliste de l'Avisé (rencontré lors du 5e salon des Solidarités) de m'avoir informé de cette initiative.

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