La politique de la maison :

Ici, pas de copié-collé, tout est du 100% rédigé.
Une attention particulière est portée sur la région Ile de France et sur le département des Yvelines.


mardi 29 juillet 2014

Disco Soupe redonne la banane aux aliments gaspillés



1,3 milliard de tonnes de produits comestibles sont gaspillés, par an, à travers le monde (selon les statistiques de la FAO -organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).  Pour lutter contre ce gaspillage alimentaire, l'association Disco Soupe sort ses armes... La musique et les ustensiles de cuisine.




Le 21 juin, 2014, place Baudoyer, près de l'Hôtel de ville de Paris, c'est la fête. De la musique, de l'été, des fruits et légumes.
Un soleil jaune comme un poivron culmine dans le ciel. Une musique reggae est diffusée par un DJ. Des adultes et des enfants dansent sur une grille qui souffle de l'air. Plus loin, sous des tonnelles blanches, des jeunes font des blagues sur des fruits et légumes. « L’oignon fait la force », « like aubergine, touch for the very first time,  « John Lemon, « le gachi salsifis », « Endive Warhol », « are you radis ».

Les bénévoles de l'association Disco Soupe, couronnés de feuilles d'aromates ou d'une perruque. Ils s'affairent sur la place. Ils sortent des fruits et légumes invendus de leurs bacs. Ces aliment à la "gueule cassée", "biscornu", dans un état de maturité avancé, viennent d'être sauvés de la poubelle d'un supermarché voisin. Colette Rapp, bénévole de Disco Soupe, explique que la récupération de ces produits est facile, car " une fois sur deux, la personne en charge des fruits et légumes est écœurée de jeter les produits invendus". Pour ces enseignes qui donnent les invendus à Disco Soupe, aucune publicité ne sera faite. Colette Rapp révèle que c'est "pour éviter d'être utilisés par ces marques". Autrement dit, pas de campagne commerciale "greenwashing", ce marketing qui reverdit l'image des sociétés participantes.  

Les passants s'approchent. Attirés par la musique, par les danseurs. Les bénévoles de Disco Soupe leur délivrent un message de sensibilisation: "Aujourd'hui, en France, 30% de la nourriture produite finit à la poubelle".

Ils sont aussi invités à préparer les fruits et légumes en salades et à venir les déguster: "venez, si vous aimez cuisiner c'est sympa (...) on va distribuer gratuitement, on va manger".

Bénévoles et passants enfilent des gants en plastique, se munissent d'un économe ou d'un couteau. Des discussions naissent entre les voisins de planches à découper.
Les aliments sont nettoyés, au vinaigre et à l'eau. Les fruits et légumes collectés sont mis en moreaux. Les parties pourries, les pépins, les peaux, sont retirées. Puis ces déchets sont mis dans des sacs plastiques au dessus desquels sont scotchés des pancartes: "composte". 
Les saladiers se remplissent de rondelles et carrés de fraises, bananes, radis, poivrons, poires, etc... Les salades baignent dans un jus de soleil, d'eau et de sucre. 





"On a un vrai impact" - Colette Rapp, bénévole de Disco Soupe:
L'assocation Disco Soupe existe depuis mars 2012. Ce mouvement, géré par des bénévoles, s’est inspiré des « Schnippel Disko » (qui peut se traduire par « émincés-disco »), organisés en Allemagne. 

Colette Rapp, de chez Disco Soupe qualifie son action comme "concrète", "porteuse de partage et de moment de plaisir". "On a un vrai impact, le format commence à être connu", ajoute t-elle.

Seule, l'association Disco Soupe ne peut peut pas résoudre le gaspillage alimentaire. Mais depuis son existence, 20 tonnes de fruits et légumes invendus ont été récupérés et cuisinés. Près de 42 000 repas ont été servis. En France, c'est 45 Disco Soupe par mois.
Pour continuer son action, Disco soupe envisage de créer des "Buena Disco Social Club", qui redistribueront des fruits et légumes à des centres sociaux. La vente de pots de confitures et des bocaux est aussi à l'étude.

Disco Soupe est une nouvelle façon de se régaler, de s'amuser, tout en limitant le gaspillage.


Par Thomas MASSON









mercredi 23 juillet 2014

Avec « Palettes de Solutions » les déchets de bois deviennent une nouvelle ressource.



 

Une coopérative, lancée en 2011 à Strasbourg, récupère les palettes en bois inutilisées. Grâce à son long travail d’ébénisterie, ces palettes abandonnées se transforment alors en mobilier et objets de décoration.

*


L’entrepôt de Palettes de Solutions éveille les sens.
Partout des piles de palettes aux couleurs différentes, de la sciure qui jonche le sol, une senteur de résine omniprésente, le bruit d’une scie, des créations, des clous rouillés, des copeaux qui volent, de la poussière de bois, des battements de cœurs mécaniques et une radio qui diffuse ses notes en fond sonore…

Pierre Wolff, gérant bénévole de Palettes de Solutions, est ici dans son élément. 

Pierre Wolff, pouvez-vous me présenter l’historique de Palette de Solutions ?


" Palettes de Solution est une association créée en 2011. C’est Monsieur Bellay, un de nos associés, qui a eu l’idée de ce projet et les moyens de le mettre en œuvre. Il a aussi trouvé ce nom, Palettes de Solutions.

Ce nom est pertinent, car nous avons de multiples solutions pour exploiter les palettes abandonnées. Nous pouvons fabriquer tellement de choses que cela fait un éventail, une palette de solutions. Ce nom évoque une infinité des possibilités. 

Quelle est la marque de fabrique de votre coopérative ?


Pour mener à bien cette entreprise, nous avons un projet écologique et social.
Social car nous faisons de la réinsertion professionnelle : les premiers salariés sont des chômeurs.
Écologique parce que les produits utilisés sont les plus naturels possibles. Nous souhaitons concevoir un mobilier qui permette de protéger l’environnement.

Sans nous, les produits récupérés auraient été détruits. A proprement parler, nous revalorisons.

Pouvez-vous me parler de votre matière première, les palettes ?


Bien souvent, les palettes nous sont données.Certaines palettes sont cassées, sont du déchet. Celles-ci sont donc peu ou pas utilisables. 
Mais la plupart du temps, elles sont en bon état, voire d’un  bois de bonne qualité: du pin et du sapin majoritairement. Parfois nous trouvons de belles sections, bien larges, de hêtre. Nous avons aussi des palettes d’arbre fruitier, du pin douglas,… 
Pleins d’essences différentes viennent composer nos pièces. Cela constitue un assemblage de teintes différentes, donnant un côté exotique. C’est intéressant sur le point de vue esthétique.

Quelles sont les activités de  Palette de Solutions ?


Avant toute réalisation, nous faisons en amont de la recherche et développement sur ordinateur. Cela consiste en des dessins, des études et calculs. Cette phase est nécessaire pour assurer une fabrication viable conjuguant la sécurité, la solidité, la résistance et la durabilité de nos produits.

Une fois ce choix effectué, nous sommes capables d’assembler des palettes pour créer des tables, des transats, des chaises, des bancs des tables, des cadres photos, des bibliothèques, composteurs, toilettes sèches, etc…













Quelle est la durée de vie de vos créations ?


Les créations ont une durée de vie comprise entre dix et vingt ans.
Bien entendu cela dépendra de son entretien et de son environnement. Car le bois vit et bouge toujours.

Votre coopérative est-elle rentable ?


Certes la palette récupérée, cette ressource, nous coûte à la base pas grand-chose. Mais le retraitement de ce déchet est  un coût pour nous. Car une fois que la palette est récupérée, nous avons une bonne dizaine de planches à démonter. Le temps nécessaire pour cette phase  rend ce bois plus cher qu’en scierie.

Cette phase de démontage est faite aujourd'hui à la main (à l’aide d’un pied de biche, d’une masse, d’un cric de voiture).
En moyenne, pour une palette standard, nous passons quinze à vingt minutes pour la démonter en entier. Cette opération est chronophage. 

Ci-dessous plusieurs vidéos, montrant différentes techniques pour démonter une palette. (Attention, certaines sont bruyantes.) 







Pour faire ce métier, il faut donc une volonté de fabriquer un produit écologique.
Mais malgré tout, nos comptes sont équilibrés. Car nos clients sont prêts à mettre un peu plus d’argent. Ils sont d’accord pour payer cette sorte d’éco-taxe à proprement dit.

 

 En parlant de clients, quels sont les rapports que vous avez avec eux ?



Nous sommes proches du client. Notre adaptation est complète. Chaque détail peut être modulé aux besoins du client. Nos maitres mots  sont : adaptabilité, sur mesure, à façon, au besoin.

On aime aussi à avoir des projets coopératifs.Parfois, nous faisons participer les clients à la fabrication et à des ateliers. Pour leur montrer notre travail, pour leur apprendre des choses. Nous sommes friands de ces activités annexes. 

Les clients peuvent même devenir des associés bénévoles, pour prendre une part symbolique dans la société.

Et vous-même vous produisez des déchets. Qu’en faites-vous ?


Le rebus, c’est les palettes et le bois de mauvaise qualité. C’est ce que nous n’utiliserons pas. Nous le redistribuons aux utilisateurs de poêle à bois. De même pour les copeaux, nous les donnons aux propriétaires de composteurs ou de toilettes sèches."

*

Le huit qui figure sur leur logo prend alors tout son sens. La boucle est bouclée. Et comme le disait Antoine Laurent de Lavoisier, "rien ne se perd, tout se transforme".
                       

Propos, photos et vidéos recueillis par Thomas MASSON


mardi 22 juillet 2014

"Chez Albert" – Une friche éphémère, mais qui « restera dans le cœur des gens »

Deux associations, Yes We Camp et La Semeuse, ont mutualisé leurs compétences. Pendant dix semaines elles ont revalorisé une friche d’Aubervilliers, ville de Seine Saint Denis. « Chez Albert » a été et restera un lieu d’expérimentation sociale, urbaine, botanique, etc… Pour que les voisins deviennent acteurs de leur vie de quartier. 

 

-« 16- A ».
- « Mais non  ! Il y a 16 – 15 ! »
- « Ah oui. Je me suis trompé. Ca arrive ! »

Après cette altercation bon-enfant, les deux joueurs de ping-pong reprennent leur partie.
Montée sur des parpaings, constituée de matériaux récupérés, cette table de ping-pong est le symbole de cette friche d’Aubervilliers. Elle montre qu’en innovant, qu’en bricolant, qu’en assemblant, on peut redonner vie à un quartier. 

Sous les déchets, la verdure :

Tarek Adda, 21 ans, étudiant en architecture d’intérieur le confirme : « avant, tout n’était que poussière. En déblayant tous les déchets, on a vu du vert. On a vu de l’herbe qui poussait. Puis on a du faire de la médiation de voisinage. Car certains voisins se plaignaient des allées et venues, de la musique, des cris. C’est marrant de voir comment tout ça a évolué ».

A première vue le 52 rue Lecuyer, près du métro « Quatre chemins » d’Aubervilliers, est  un immense terrain vague.
Sous nos pieds, une terre malmenée. Par du gravier, des cailloux, des morceaux de bitume,  et des flaques d’eau.  Autour de nous, les murs sont tagués. Des mauvaises herbes qui piquent, sont hautes comme des Hommes. A deux extrémités de la friche, un homme seul écluse une bière tandis qu’une bande de jeunes roulent un pétard. On se sent un peu mal à l’aise. Mais finalement, ce lieu prend vie.
Celui qui buvait et ceux qui s’apprêtaient à fumer partent. Autour de l’eau, élément essentiel pour la vie, tout s’anime. Deux chiens s’amusent dans les flaques. Faisant un joyeux vacarme. Une fillette lance des cailloux dans une des flaques d’eau. Sur un côté, un potager en forme de « trou de serrure »,  accueil des courgettes, des tomates, des piments et une coccinelle. Des enfants, pour se rafraichir de la chaleur, courent sous une structure de tuyau d’arrosage. 

« Chez Albert », est aussi un lieu où des constructions sommaires abritent l’activité de l’Homme.
Sur des bancs et transats, sous une ombrière, faits d’assemblages de palettes, des gens échangent et se reposent. Un barbecue en parpaings fume et fait cuire des grillades. Sous une cabane évolutive, faite de poutres de métal et de planches de bois, une dame lit les aventures d’un certain Ismaël, artiste qui fait des cabrioles dans les rues. A l’autre bout, une association locale étend sur un banc ses outils, pour réparer les vélos. Sur la gauche, une mini serre semble être rudimentaire. Mais en s’approchant, on s’aperçoit qu’elle est connectée à l’aide d’une webcam et de panneaux solaires. Eparpillés sur des tables, sont disposés des confitures de poivrons, des tartelettes aux fraises, du sirop de mauve, du thé à la menthe, des spécialités algériennes et vénézuéliennes. Des jeunes s’affrontent pendant un tournoi de pétanque.

Un homme et deux femmes traversent la friche,  couronnes de fleurs juchées sur leurs têtes.  Le ciel est traversé par du pollen, des bourdons et des avions.



Une association d’associations : 

Cette friche est la propriété d’EPF (Etablissement Public Foncier). Cela faisait plusieurs années que ce terrain était laissé à l’abandon.
Pour le faire revivre, il aura fallu de la pugnacité. Celle d’Ingrid Amaro, coordinatrice de l’association « La semeuse –Plateforme pour la biodiversité urbaine ». Elle aura du négocier entre octobre 2013 et fin mai 2014. Appuyée par la mairie d’Aubervilliers, Ingrid Amara a eu gain de cause. Jusqu’à fin 2014, cette friche d’Aubervilliers pourra être occupée, de manière gratuite.
Ingrid Amaro est une paysagiste et designer urbaine d’origine espagnole. Pour elle, « cette friche abolit les frontières, mélange les gens et les compétences. Nous intervenons pour que les gens soient acteurs de leur environnement et de leur espace. Avant, il ne s’y passait rien. Cette initiative va s’imprimer dans le cœur des gens ».  

Pour diversifier les compétences, elle payé 10 000€ l’association « Yes We Camp ». Qui a fait ses preuves en 2013, en créant à Marseille une mini-ville éphémère de plusieurs centaines d’habitants. Lisa Georges, botaniste bénévole de  Yes We Camp explique que son association a pour rôle de « mettre les gens en situation de faire les choses, de se rencontrer. Nous sommes juste là pour impulser des dynamiques ». Elle constate qu’ « à Aubervilliers, il y a des gens de tous les pays » et espère que « pendant quelques semaines on a permis à des gens de se rencontrer ». 

La friche transformée en culture(s) : 


Au 52, rue Lécuyer de la ville d’Aubervilliers, métro « quatre chemins », il ne faut plus parler d’une friche.
Le mot culture, ou cultures, est plus approprié à cet endroit.  Car maintenant les voisins, d’origines différentes, s’y rencontrent. Car il se cultive des courgettes, piments, tomates, choux. Car des manifestations culturelles de tout type s’y tiennent. Aux parties de ping-pong, s’ajoutent des tournois de pétanque, ateliers réparation de vélos, lectures, ventes de spécialités culinaires, etc… 

 

« Quand on ouvre une nouvelle ligne de bus, personne ne la prend. Il faut du temps » - Lisa George de Yes We Camp : 

Le bilan se fera sur le long terme, dans plusieurs mois. D’autant plus que le 13 juillet 2014, l’association YES WE CAMP a quitté les lieux. C’est maintenant La Semeuse prend la relève de manière autonome. Jusqu’à la fin de l’année, cette association sera entourée par d’autres associations locales, un architecte et certains habitants. Des pièces de théâtre, ateliers d’écriture, cours de salsa et le développement des jardins sont au programme.
En tout cas, Ingrid Amaro, coordinatrice de la Semeuse et confiante, car elle affirme qu’ « on a tous un pouvoir fou ».

En partant de cette friche, vous entendrez une dernière fois son pouls. Vous entendrez la balle de ping-pong rebondissant contre la planche et tapant contre les raquettes. Tant qu’il y aura cette table, la vie sur cette friche sera rythmée…


PS: merci au journaliste de l'Avisé (rencontré lors du 5e salon des Solidarités) de m'avoir informé de cette initiative.